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Nous avons besoin de nouvelles armes contre l’islamisme radical

Le Temps.ch

 

vendredi 09 janvier 2015

Politique Internationale

 

Sylvain Besson

 

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Il fallait s’y attendre. Derrière les condamnations unanimes, l’attentat contre Charlie Hebdo a réveillé un débat volcanique sur la place de l’islam dans les sociétés européennes.

A l’annonce du carnage, de nombreuses voix se sont élevées pour dénoncer la présence d’une «cinquième colonne» de musulmans fanatisés (Nigel Farage, eurosceptique britannique), regretter la «complaisance coupable» des Européens face à l’islamisme (Pascal Bruckner, intellectuel français), ou annoncer que l’Occident «est en train de perdre la guerre», faute d’avoir su désigner l’islam comme son «ennemi» (Marc Bonnant, avocat genevois).

On aurait tort de considérer ces opinions comme marginales. Un sondage publié jeudi par Die Zeit montre que 57% des Allemands voient l’islam comme une menace. Ce pourcentage est sans doute aussi élevé dans d’autres pays du Vieux Continent.

Ces chiffres, recueillis avant même le massacre de Paris, confirment qu’il est urgent de s’attaquer aux racines du mal. Comment assécher le marigot djihadiste qui prospère toujours au sein des sociétés européennes?

La réponse ne peut être uniquement répressive. Quatorze ans de guerre et de frappes incessantes n’ont pas anéanti
la fascination qu’exercent ­Al-Qaida et ses rejetons sur certains individus. Contre eux, l’action de la police et des services de renseignement doit être intensifiée, mais elle se heurtera toujours à des limites matérielles: il faut 25 à 30 fonctionnaires pour surveiller en permanence un suspect de terrorisme.

Le mieux qu’on puisse espérer est donc de réduire la fréquence et la gravité des attentats. Pour cela, il faut affaiblir l’emprise de l’idéologie du djihad sur les musulmans européens. C’est un combat civilisationnel qui requiert de nouveaux instruments, plus fins que ceux mis en œuvre jusqu’à présent.

Réformer l’islam, ou ramener la paix au Proche-Orient, est largement hors de portée des Etats européens, même s’ils peuvent y contribuer. En revanche, ils peuvent renforcer la capacité de leurs musulmans à extirper le chancre djihadiste. Cela passe par la formation d’imams bien éduqués, qui comprennent et reconnaissent le cadre démocratique. L’islam en Europe est encore trop influencé par des religieux importés, rétrogrades, ou nourris à la version saoudienne de leur religion.

Nos Etats doivent promouvoir des voix différentes, modernes, comme celles qui se sont exprimées après l’attentat contre Charlie Hebdo . Ces réactions immédiates de solidarité venues de personnalités musulmanes sont un signe encourageant. Au lendemain du 11-Septembre, on avait trop entendu dans leurs rangs un discours victimaire, voire négationniste («il y a un complot, ce ne sont pas des musulmans qui ont fait cela»).

C’est une première victoire, modeste, contre le terrorisme. Il en faudra bien d’autres pour en venir à bout.



09/01/2015
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