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La Russie poursuit ses bombardements en Syrie, sur des cibles incertaines

Le Monde.fr

 

Le 01-10-2015

Politique Internationale

 

Le Monde.fr avec AFP et AP

 

                       

Les frappes russes du 30 septembre 2015 en Syrie. Infographie "Le Monde"

 

Au lendemain des premiers bombardements par l’armée russe dans les régions de Homs et de Hama, en Syrie, mercredi 30 septembre, la Russie et les Etats-Unis se sont mis d’accord sur la tenue d’une réunion d’urgence afin d’éviter tout incident militaire entre leurs aviations.

 

Selon des diplomates, la Russie a également distribué au Conseil de sécurité de l’ONU un projet de résolution qui associerait le régime syrien à une large coalition contre le groupe Etat islamique (EI) et le Front Al-Nosra. Moscou « demande à tous les pays de participer autant que possible à ces efforts [contre la menace terroriste] et de coordonner leurs activités, avec le consentement des Etats sur les territoires desquels de telles activités sont menées ».

Les Etats-Unis, qui sont déjà depuis un an à la tête d’une coalition d’une soixantaine de pays contre les djihadistes, ne veulent pas entendre parler d’une coopération avec le régime du président syrien, Bachar Al-Assad. Paris et Londres sont aussi opposés à une collaboration avec Damas. Ces trois pays ont droit de veto sur toute décision du Conseil.

En attendant, l’armée russe a continué à bombarder des cibles sur le sol syrien et a annoncé jeudi avoir déployé plus de cinquante avions et hélicoptères, ainsi que des troupes d’infanterie de marine, des parachutistes et des unités de forces spéciales pour son dispositif militaire sur place.

Lire aussi : Au bout d’un an, quel est le bilan de la coalition internationale contre l’EI ?

 

  • Des cibles toujours incertaines

Moscou continue à affirmer viser des « positions de l’Etat islamique », mais de plus en plus de voix s’élèvent pour mettre en doute cette version des faits. Selon les médias syriens, et une source de sécurité citée par l’AFP, ce sont en réalité des rebelles de la coalition, dite de « l’Armée de la conquête », qui ont été visés jeudi dans les provinces d’Idlib et de Hama, largement contrôlées par l’armée syrienne.

De son côté, le sénateur américain John McCain a affirmé jeudi sur la chaîne de télévision CNN que les bombardements russes en Syrie de mercredi avaient visé des rebelles entraînés et financés par la CIA, notamment pour combattre l’organisation Etat islamique.

 

Lire la synthèse : Que visaient les premières frappes russes en Syrie ?

 

Une source de sécurité syrienne a assuré que les « avions russes et syriens [avaie]nt mené plusieurs raids contre des positions terroristes à Hama et à Homs », dans le nord-ouest du pays. Or, ces régions sont tenues par le Front Al-Nosra, la branche syrienne d’Al-Qaida, et par d’autres rebelles, dont certains sont financés par les Etats-Unis.

Selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH), dans la région de Hama, les premières frappes ont visé des bases du Front Al-Nosra et du groupe islamiste Ahrar Al-Sham. Ces deux formations constituent la colonne vertébrale de Jaysh Al-Fatah (« l’Armée de la conquête »), une alliance rebelle qui a mis en déroute les troupes gouvernementales, au printemps, dans la province d’Idlib.

Au nord de la ville de Homs, Al-Nosra a aussi été touché, toujours selon l’OSDH, mais les tirs russes ont surtout fait des victimes civiles — trente-six, d’après le chef de l’opposition syrienne en exil, Khaled Khoja. La brigade Tajamu’Al-Izza, affiliée à l’Armée syrienne libre (ASL), la branche modérée de l’insurrection, habilitée à recevoir des missiles antichars par les Etats-Unis, a ainsi été ciblée.

 

 

  • Les diplomates émettent des doutes

En pleine Assemblée générale de l’Organisation des Nations unies (ONU), monopolisée par le conflit syrien, les frappes russes réalisées à la demande du gouvernement syrien ont immédiatement suscité des doutes de la part des Occidentaux quant aux objectifs de M. Poutine : vaincre les djihadistes de l’organisation Etat islamique (EI) ou renforcer le régime du président syrien, Bachar Al-Assad ?

 

Le secrétaire à la défense américain, Ashton Carter, a jugé que les frappes ne visaient « probablement pas » l’Etat islamique, qui contrôle une partie de la Syrie. « Cela revient à verser de l’huile sur le feu », a-t-il résumé.

Il y a « des indications selon lesquelles les frappes russes n’ont pas visé Daech [acronyme arabe de l’EI] », a aussi noté le chef de la diplomatie française, Laurent Fabius, ajoutant qu’il « faudrait vérifier quels étaient les objectifs » des avions russes.

Même écho du côté du ministre des affaires étrangères turc, Feridun Sinirlioglu, qui a exprimé les « graves préoccupations » de son pays « au sujet des informations selon lesquelles la Russie aurait ciblé des positions de l’opposition plutôt que celles de Daech et que ces frappes auraient également fait des victimes civiles ».

 

Lire aussi : A l’ONU, scepticisme des diplomates occidentaux face aux intentions russes en Syrie

 

Répondant aux questions de la presse internationale, dont Le Monde, le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, a également reconnu être « préoccupé par les rapports dont nous disposons, qui nous indiquent que les frappes russes n’étaient pas dirigées contre l’Etat islamique, et surtout par le fait qu’il n’y a pas eu de réel effort de la part des Russes pour coordonner [deconflict, en anglais] les frappes avec les combats en cours, menés par la coalition dirigée par les Etats-Unis ».

 

Lire les réactions : Pour l’OTAN, les frappes russes « n’étaient pas dirigées contre l’EI »

 

A New York, le russe Sergueï Lavrov avait assuré jeudi, en réponse à ces interrogations : « Les rumeurs selon lesquelles les cibles n’étaient pas des positions de l’Etat islamique sont sans fondement. »



01/10/2015
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