Suisse-Regard

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Les entreprises encouragées à contourner les 35 heures

Le Temps.ch

 

Le 4-11-2015

Economie internationale

 

Par Richard Werly

L'annonce, mercredi, d'une réforme du code du travail d'ici 2018 est marquée par les possibilités accordées aux entreprises de déroger à la durée légale hebdomadaire si controversée

 

Les totems sociaux français sont toujours debout, et l'exemple suisse souvent cité par les partisans d'une plus grande flexibilité du marché du travail hexagonal est encore à des années-lumière. L'annonce, mercredi, par le premier ministre Manuel Valls et la ministre du travail Myriam El Khomri d'une réforme du code du travail d'ici 2018 s'est accompagnée d'infinies précautions politiques, loin du coup de gueule poussé devant les caméras à l'automne 2014 par François Bayrou contre ce code lourd de prés de 3 700 pages. Le leader centriste l'avait alors jeté par terre, le comparant au code des obligations helvétique, bien plus mince. Le président du Medef (patronat) Pierre Gattaz avait peu après cité lui aussi la Suisse en référence. 

Pas question, pour le gouvernement socialiste, de remettre en cause les «droits fondamentaux des salariés» et «l'ordre public social», formules utilisées pour désigner le salaire mensuel minimum (Smic) de 1457 euros brut, le haut niveau de protection du contrat à durée indéterminée (CDI) et les 35 heures légales hebdomadaires instituées en 2000 par la gauche. Pas question non plus de forcer la main aux syndicats et de risquer un affrontement avec les deux organisations les plus arc-boutés sur les acquis sociaux: la CGT pro communiste et Force Ouvrière. Comme prévu, les négociations se dérouleront surtout dans les branches industrielles (qui seront ramenées de 700 à 200) et les entreprises. Le tout, après la convocation à partir de la fin 2015 d'un "comité des sages" dirigé par Robert Badinter co-auteur en juin d'un livre, «Le travail et la loi» (Ed. Fayard), sévère envers la lourdeur juridico-sociale française. 

 

Editorial: «Esquiver les 35 heures n’est pas réformer»

 

Brèche ouverte

Une brèche n'en est pas moins ouverte sur le front symbolique des 35 heures. Si les entreprises ne pourront pas décider de s'en affranchir, le réaménagement annuel de la durée hebdomadaire du travail, ainsi que les congés et récupérations pourront permettre d'y déroger dès 2016. Cette ouverture répond aux appels du ministre de l'économie Emmanuel Macron qui, à la fin août, avait déclaré devant le patronat que «croire que cela pouvait aller mieux en France en travaillant moins était une fausse idée». Une méthode similaire à celle de Nicolas Sarkozy qui avait introduit en 2007, dès le début de son quinquennat, la possibilité de défiscaliser les heures supplémentaires pour contourner les 35 heures. La nouvelle majorité de gauche avait ensuite supprimé ce dispositif en 2012 alors que selon les sondages, prés de 70% des français souhaitent une telle flexibilité. 

Le calendrier en dit long sur la manœuvre. En promettant une réforme d'ici 2018, soit au lendemain de la présidentielle de mai 2017, le gouvernement français prend un engagement dont il ne sera pas directement comptable. Les patrons devraient en revanche, comme ils l'avaient fait sous Sarkozy, profiter des assouplissements envisagés. Dans son rapport  d'évaluation des économies du pays du G20, publié ces jours-ci, le Fonds Monétaire international (FMI) a de nouveau critiqué la régulation excessive de la France et recommandé à celle-ci de «poursuivre sur la voie de la libéralisation» pour faire baisser le niveau record du chômage avec 5,4 millions de demandeurs d'emploi, toutes catégories confondues.

 



05/11/2015
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