Suisse-Regard

Suisse-Regard

Pour Angela Merkel, l’asile décidera du sort de l’Europe

Le Temps.ch

 

Le 04 septembre 2015

Politique Internationale

 

Yves Petignat

 

Editorial

 

En visite à Berne, la chancelière, Angela Merkel, voulait d’abord s’informer de la restructuration du processus d’asile en Suisse. En réalité, c’est elle qui a donné aux Suisses une leçon de courage, de pragmatisme et de volonté politique.

 

En visite à Berne, la chancelière, Angela Merkel, voulait d’abord s’informer de la restructuration du processus d’asile en Suisse. En réalité, c’est elle qui a donné aux Suisses une leçon de courage, de pragmatisme et de volonté politique.

Certes, l’accélération de la procédure, les garanties judiciaires accordées aux requérants, la régionalisation des centres d’audition peuvent inspirer Berlin, tout comme l’examen accéléré des demandes provenant des ressortissants des Balkans. L’Allemagne souffre en effet de la lenteur des décisions et de l’embouteillage créé par les flux de requérants de Serbie, du Kosovo ou de Macédoine auxquels l’asile sera finalement refusé.

Pour le reste, les dirigeants suisses ont de quoi apprendre de l’action de la chancelière. Pour le courage d’abord. Devant les ruines de lieux d’accueil incendiés, Angela Merkel a tenu des propos fermes pour condamner la haine raciale. Tout en rappelant les valeurs de la société allemande et le pilier que sont les droits de l’homme pour l’Europe. Même si ses compatriotes trouvent qu’elle a longtemps tardé, elle a su réveiller l’humanisme allemand. Des mots que l’on peine à entendre en Suisse.

Alors qu’à Berne une administration tatillonne en est encore à séparer un couple de réfugiés syriens pour des raisons administratives, le mari à Rome et l’épouse à Zurich, l’Allemagne a pris sur elle de rompre avec la règle du renvoi automatique des réfugiés dans le premier pays d’accueil européen, comme le permet l’Accord de Dublin. De la flexibilité, prône Angela Merkel.

Mais surtout, avec son plan de politique européenne de l’asile, elle ne craint pas de provoquer ses voisins de l’Est, Polonais, Tchèques, Hongrois. Avec la France, l’Allemagne pousse les Européens à réagir.

Très tard, bien sûr, puisqu’il y a quelques mois, Berlin et Paris préféraient encore miser sur le volontariat plutôt que de brusquer Londres ou Varsovie.

Angela Merkel, qui se souvient de ce que ses proches et amis de l’ex-RDA doivent à l’accueil et à la prise en charge par leurs compatriotes de l’Ouest, mesure bien à quel point la question des réfugiés est fondamentale pour l’Europe. C’est un enjeu décisif. Si la solidarité dans la répartition du poids des migrants échoue, c’est la libre circulation et l’espace Schengen qui seront remis en cause.

Or l’Allemagne, accusée de pousser la Grèce à la faillite, ne peut se permettre d’abandonner une deuxième fois l’Europe du Sud.

Après la crise financière et économique, l’UE pourrait-elle survivre à la crise migratoire? Hélas, en appeler à une Europe morale risque de ne pas suffire.

 



06/09/2015
0 Poster un commentaire

A découvrir aussi


Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 3 autres membres